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8. En quête d'authenticité


Mac Leod Ganj, juste en dessus de Daramsala est la terre d’accueil des tibétains en exil et du Dallai Lama. A notre arrivée, nous étions plutôt déçus par l’endroit bondé de touristes, la circulation dans la ville et le bruit… Nous nous sommes dirigés vers Bhagsu, un village à 2km. Bhagsu est un véritable repère pour hippie, baba cool et israéliens. En quête de tranquillité et d’authenticité, ce village et l’ambiance «fiesta hippie » n’ont pas vraiment répondu à nos attentes. Nous avons quitté cet endroit pour trouver une guest house plus à l’écart des touristes en dessus de Daramkot (situé en dessus de Mac Leod Ganj).



Bon alors quand on n’est pas malade, qu’est-ce qu’on fait ici ? On se promène dans la nature à travers les forêts de pin, escaladant des rochers, affrontant des pentes bien raides qui développent nos petits muscles et notre endurance… A mon goût, la nature ici ressemble un peu trop à la Suisse, mais à la grande différence de la présence de nombreux singes dans la forêt. C’est fantastique de les regarder jouer au toboggan sur les pentes de sables, ils sautent de branches en branches dans les arbres, s’amusent entre eux ou bien se pouille… L’observation des singes est une belle occupation. Parfois, lorsque l’on veut se replonger un peu plus dans la civilisation on descend au village de Mac leod par un joli petit chemin en forêt, une marche sympa de trente minutes (un peu moins sympa la remontée mais c’est un bon exercice).


La quête de l’authenticité


On l’a cherché ce coin de paradis perdu. On a déménagé trois fois, allant de plus en plus vers ce que nous recherchions… On est monté de plus en plus haut dans la montagne pour trouver notre petit coin perdu, une cabane juchée sur une falaise, enclavée à moitié dans une grotte, construite par un lama tibétain, véritable hermite. Loin de tout, sans électricité ni eau courante… C’est en quittant les sentiers battus, au cours d’une promenade, que Fred est tombé sur cette cabane, et comme par enchantement sur le lama tibétain qui lui a donné la permission de squatter l’endroit gratuitement.

Retourner à l’essentiel, vivre avec presque rien… Inspiré par le film « Into the wild », nous avions envie de nous perdre loin de tout, en pleine nature. On s’en va demain et ce pour une durée indéterminée…

P’tite anecdote : Etais-ce un test ? Hier soir dans notre petite guest house de Daramkot, nous avions tout l’attirail devant la porte : scorpion, araignée et scolopendre (en version plutôt miniature par rapport à ce qui peut exister ici…).



La découverte de la cabane (par Fred)


Cela faisait quelques jours que nous séjournions dans un petit village au pied des montagnes himalayennes, situé à 2 km au nord de Mac Leod Ganj. Ayant retrouvé mes énergies et un état d’esprit plus positif après la turista (cf. article « La turista ») qui m’a fortement diminué pendant 5 jours, je décidai de partir seul explorer les contreforts du massif montagneux surplombant le petit village, à la recherche d’un endroit perdu et authentique. Des indiens m’avaient informés que quelques ascètes tibétains vivaient reclus dans des cabanes et cavernes de fortune là-haut dans la montagne.

Sans trop savoir où aller, je laissai mon mental de côté pour m’en remettre à ma guidance intérieure. Après 1’heure de marche et une forte dénivellation dans les jambes, je m’arrêtai quelques instants pour reprendre mon souffle et pour contempler la belle vue qui s’offrait à moi. C’est alors que mon regard se posa sur la pointe d’un rocher en contre-haut, à environ une centaine de mètres de moi. Je contemplais plus attentivement ce rocher et j’aperçus aux travers des branchages quelques drapeaux de prière tibétains flottant au vent et projetant dans les airs les énergies subtiles produites par les ondes de formes et la symbolique des textes sacrés. Une curiosité mêlée d’une émotion d’excitation indescriptible m’incitèrent à explorer l’endroit. Après quelques mètres sur le chemin de pierre, je bifurquai sur un sentier dont l’aspect me fit penser qu’il n’avait dû être que peu emprunté jusqu’alors. Ce constat fut rapidement confirmé lorsque je dus arpenter un étroit sentier jonché de feuilles mortes et parsemé de racines et de pierres qui ralentirent mes pas, ce qui eut pour effet de créer une opposition entre la partie de moi galvanisée à l’idée de découvrir un lieu fantastique et celle qui m’imposait la prudence. La vue de nombreux drapeaux de prières annonça mon arrivée vers l’endroit que j’avais vu quelques minutes auparavant depuis le chemin en contrebas. Le rocher que j’avais perçu depuis le chemin n’était en réalité que la pointe d’une immense masse rocheuse, dont la base incurvée formait une cavité naturelle à l’intérieure de laquelle se trouvait une petite cabane de fortune. Voilà que je me trouvais devant l’endroit que je me voyais habiter depuis des mois, lorsque je me laisser aller à la rêvasserie et aux créations mentales en adéquation avec mes aspirations de liberté et d’authenticité. Ahah voilà que sans en être conscient, mes projections mentales et les émotions de joie que je ressentais en m’imaginant pouvoir vivre dans de telles conditions ont contribués à créer la réalité dont j’étais présentement à la fois l’acteur et le spectateur. Cependant, mon enthousiasme fut tantôt rattrapé par le constat que cette cabane devait être la propriété de quelqu’un (comme en témoigna le solide cadenas fermant la porte d’entrée) et qu’il ne nous serrait pas possible d’y séjourner.

Un tantinet frustré mais pas découragé, je retournai sur mes pas pour retrouver le chemin en contrebas et continuer mon exploration du versant sud de la montagne. J’espérais fortement rencontrer d’autres endroits semblables accessibles et ouverts aux voyageurs en quête d’expériences authentiques. Soudain, une silhouette apparût en aval du sentier. Je reconnus les couleurs de l’habit traditionnel des moines bouddhiste. Eh oui, c’en était bien un crénom ! J’ai immédiatement pensé que c’était lui le propriétaire de la cabane. Il m’adressa un large sourire cordial et irradiant de bonté. Je lui demandais en anglais si la cabane lui appartenait et il me confirma que oui. Nous tentâmes de converser quelque peu mais j’eus bien de la peine à le comprendre, son anglais étant bien pire que le miens (ce qui est assez rare pour être signalé). Toutefois, je crus comprendre que la cabane était libre et que je pourrais y vivre un moment si je le voulais mais qu’il devait la remettre en état car un précédent voyageur irrespectueux avait causé quelques dégâts. J’en conclus donc que l’endroit était disponible pour les voyageurs et ce constat me réjouis fortement. Je lui demandais s’il lui était possible de m’en montrer l’intérieur et je sus qu’il comprit ma question et qu’il y répondit par l’affirmative lorsqu’il s’élança sur le sentier en m’invitant à le suivre d’un geste dynamique de la main.

Je fus surpris de voir à quelle vitesse et avec quelle agilité un homme d’une soixantaine d’années pouvait remuer sa carcasse sur le sentier accidenté que j’avais bien eu du mal à emprunter quelques minutes plus tôt. Il faut dire que l’homme avait le regard vif et la silhouette athlétique, sûrement les conséquences d’une vie ascétique saine et harmonieuse dans un milieu naturel et plein de bonnes énergies. Arrivé sur les lieux, le moine chercha la clé du cadenas à peine dissimulée entre les pierres du mur extérieur et m’invita à entrer à l’intérieur après en avoir ouvert la porte.

Pénétrant dans l’antre du moine, je fus traversé de parts en parts par des vagues d’émotions positives et j’eus bien de la peine à me retenir de pousser une braillée libératrice qui n’aurait pas manqué de terroriser ce gentil moine. Les émotions furent si fortes que j’en eu même des palpitations. Je parvins cependant à me maîtriser suffisamment pour lui demander avec sérieux et intérêt s’il serait possible de vivre quelques temps ici. Il me répondit que oui mais il y eu un MAIS que je n’ai pas compris sur le moment (et que je comprendrai seulement quelques jours plus tard, cf. article « la cabane »). Je l’informai que je monterais certainement avec Anisia 1 ou 2 jours plus tard et le remerciai de sa générosité. Je quittai le moine qui restait sur place pour nettoyer et amorçai la descente du retour à la Guest house où nous séjournions avec Anisia, tout excité à l’idée de lui raconter la fantastique découverte et mon improbable rencontre avec ce personnage. Je ne pus m’empêcher de porter un regard amusé sur cette découverte, avec la perspective de l’être « spirituel » qui est convaincu que rien n’est le fruit du hasard et que toutes les réalités vécues dans le monde phénoménal découlent de scénarios élaborés intérieurement par les Dieux créateurs que nous sommes, que nos créations soient conscientes ou pas (comprenne qui pourra…). Je vous invite à lire le récit de notre expérience dans la cabane, rédigé par Anisia. En vous remerciant de m’avoir lu.




La cabane


Fred vous a raconté sa rencontre insolite avec le moine tibétain, à mon tour de vous compter la suite de l’histoire avec mes propres mots…

C’est dans un cadre idyllique et sauvage, après une marche pénible d’une heure et demie (en montée bien sûr), que je découvre stupéfaite et avec émerveillement la vieille caverne en pierres enclavée à moitié dans une grotte que Fred a dénichée deux jours auparavant. Entouré de bosquets de rhododendrons, d‘arbres et de rochers, avec une vue surplombant toute la vallée, c’est un véritable petit coin de paradis « into the wild » qui me laisse sans voix !

En dessus de la ville et de la civilisation, on est comme des observateurs du monde. Ici, on est au pied de l’Himalaya, devant nous, la vallée qui bouillonne et grouille, derrière se dressent les hauts sommets où siègent les neiges éternelles.

La caverne et ses environs ne disposent d’aucune source d’eau. Donc, pour survivre, il a fallu trouver de l’eau potable dans la montagne. Malheureusement, la source d’eau la plus proche que nous avons trouvée et qui est facilement accessible était à 2 km de là, plus bas dans la montagne. Fred a pris quelques bouteilles vides et deux jerricanes de 10 litres et est parti chercher de l’eau. Alors qu‘il remplissait les contenants, il a vu un gros nuage sombre lui foncer dessus a une vitesse inimaginable (et oui le temps change très vite en montagne) et n’a pu que constater que l’eau, et bien ça mouille ! Trempé jusqu’à l’os, sans équipement adapté pour la pluie, il est péniblement remonté sur les pentes raides menant à la cabane avec les deux jerricanes dans chaque main et 10 kilos d’eau supplémentaire dans le dos. Pendant ce temps, je m’afférais à la préparation d’un repas en prenant soin de garder le feu allumé suffisamment longtemps pour cuisiner en même temps riz, lentilles et légumes, tout cela en essayant de récolter un peu d’eau de pluie pour la cuisson des aliments (véritable Mac Giver en devenir J). Une heure plus tard, Fred arrive exténué, les trapèzes en feu, juste à temps pour passer à table (au « sol » serait plus juste).

Nos repas, on ne peut que les apprécier car ils ont été élaborés avec les moyens du bord, mais surtout au prix de nombreux efforts. Après être allé chercher l’eau, il faut descendre de notre montagne en quête de légumes et de fruits en ville. C’est une longue ballade et un retour parfois un peu brutal à la civilisation, au bruit, au trafic… Faire un feu c’est aussi toute une histoire car c’est difficile de garder le feu en vie. On a un petit réchaud à benzine dont on a dû apprendre intuitivement le fonctionnement mais qui ne fonctionne vraiment pas bien. Le vieux moine tibétain nous a offert gracieusement des espèces de racines bizarres en spirales cueillies dans la forêt. Après maintes hésitations, on s’est dit que coupées en morceau et bouillies ça devait être mangeable et même pas mauvais. Au menu, riz, lentilles et un peu de légumes. Est-ce le fait d’avoir cuisiné au prix de nombreux efforts, avec une dégustation devant la vue sur toute la vallée, qui ont rendu les repas si succulents ? Ah oui, au fait, il me faudrait la recette de la soupe aux orties cela m’éviterait bien des kilomètres pour chercher les légumes…

Les nuits sont fraiches dans la grotte avec une simple petite couverture polaire. Le vieux moine a préparé un lit à partir de feuillages cueillis dans la forêt, de sacs remplis de feuilles séchées, de quelques cartons et coussins, le tout recouvert d’un vieux tapis poussiéreux. La première nuit, on l’a sentie passée, prenant conscience de tous les os pointus de notre corps. Couchée sur le dos, je sentais les branchages sous ma colonne vertébrale. Il a fallu refaire le lit, ajouter des feuillages, remplir les trous en emboitant mieux les rembourrages… après de nombreux essais on peut dire qu’on a réinventé le premier prototype du lit « happy ».

La nuit, les lumières de la ville sont comme des étoiles qui scintillent au loin… La vue est incroyable et je me laisse imprégner des heures par ce qui m’entoure. La pluie a enfin cessé de tomber, nos affaires peuvent sécher à présent. Toutes sortes de bruits rappellent que nous sommes en pleine forêt peuplée, parait-il, par des ours noirs et des léopards (est-ce une légende ou la réalité ? Je ne sais pas, mais nous avons pris soin de bien fermer la porte la nuit par sécurité).

Quelques jours plus tard, une mauvaise surprise se présente à nous alors que nous sommes maintenant bien installés et bien organisé dans notre jolie cabane et prêts à y vivre encore quelques temps. En effet, c’est notre moine qui débarque accompagné d’un de ses amis russes qui comptait venir passer une retraite spirituelle dans ce lieu. La venue de ce Russe avait été annoncée à Fred lors de sa première rencontre avec le moine tibétain, mais il n’avait pas bien compris ce que ce dernier voulait lui dire. Il est clair que nous sommes frustrés de devoir quitter ce bel endroit plus tôt que prévu, mais nous essayons de prendre la chose avec lâcher-prise et acceptation, car nous avons tout de même pu vivre une expérience exceptionnelle qui nous a beaucoup enrichi et qui restera gravée dans notre mémoire.

Nous revoilà maintenant redescendu de la montagne et de retour dans la civilisation, dans notre Guest House, en transit pour 2 à 3 jours avant de partir en direction de Manali et du Ladakh.




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